Par Romain Henaut Ostéopathe DO.
Après un accident ou une chirurgie vient la cicatrisation, elle est l’étape finale de la guérison. C’est lorsque la cicatrisation est terminée que l’on se considère guérit. Une cicatrice même très visible s’estompe avec le temps, même si elle ne disparaît jamais vraiment elle peut devenir très discrète. Il est alors commun d’oublier l’existence d’une cicatrice et du traumatisme qui lui est associé, elle est considérée dans notre esprit comme normale et négligeable.
Si l’apparence et la considération que l’on a d’une cicatrice est une chose, son influence sur le processus postural en est une autre.
Les cicatrices sont trop peu considérées, elles peuvent être à l’origine de verrous articulaires du rachis
Une cicatrice est de nature différente de la peau qu’elle remplace, elle est composée essentiellement de collagène est ne possède pas la même qualité d’élasticité que les tissus qui constituent la peau. Cette perte d’élasticité entraîne des tensions de part et d’autre de la cicatrice sur la peau avoisinante qui viennent perturber l’activité des mécanorécepteurs.
Les mécanorécepteurs sont des récepteurs sensoriels présents dans tout le corps, ceux présent dans la peau sont sensibles aux étirements et aux déformations. Ils sont responsables de la sensibilité de pression, de vibration et du toucher.
Leur stimulation permanente par une cicatrice a pour conséquence un ajustement erroné du muscle tonico-phasique correspondant au dermatome (territoire nerveux) de la cicatrice. Autrement dit, la cicatrice entraîne une tension permanente des muscles qui a pour conséquence une restriction du mouvement des vertèbres correspondant aux territoires nerveux où se situe la cicatrice.
Pour le dire plus simplement, une cicatrice peut perturber l’activité musculaire et restreindre la mobilité d’un segment de la colonne vertébrale.
D’un point de vue des amplitudes articulaires et selon le territoire nerveux concerné, une cicatrice d’appendicite à l’abdomen peut restreindre le mouvement des lombaires, une cicatrice de vaccin sur l’épaule peut restreindre le mouvement des cervicales et cela pour toute une vie.
Ces restrictions de mobilité sont alors le lit de douleurs chroniques puisqu’elles agissent comme un verrou sur la colonne vertébrale.
Les cicatrices peuvent déstructurer le processus postural et générer des douleurs chroniques
Le processus postural émerge de la fonction de 4 extérocepteurs qui sont l’œil, les dents, la peau et schéma corporel ( Le schéma corporel étant la carte mémoire posturale, le référentiel de cohérence de l’individu, il maintient la cohérence de l’individu dans le temps, tout au long de la vie).
On appelle extérocepteur une structure nerveuse qui capte les modifications du milieu extérieur. Si un seul des 4 extérocepteurs du processus postural donne une information erronée alors le processus postural ne peut pas rester structurer.
La peau est l’extérocepteur dans lequel la limite du processus postural se signifie, on l’appelle extérocepteur de la limite.
Une cicatrice peut donc à elle seule perturber cette limite et donc destructurer le processus postural. Le corps se gauchit dans l’espace en conséquence et le tonus musculaire s’effondre.
les douleurs apparaissent en conséquence de la déstructuration du processus postural
Dans ces cas-là ces cicatrices sont dites pathologiques. Il peut s’agir d’une cicatrice de chirurgie, d’un grain de beauté enlevé, d’une brûlure, d’une coupure ou bien encore la marque d’un vaccin. Elles peuvent être boursouflées (chéloïde), rétractées, mais peuvent être également douloureuses, insensibles, dysesthésiques ou apparaître parfaitement saine.
En réalité leur apparence et leur taille n’a aucune importance, seul leur influence ou non sur le processus postural est à considérer. Une cicatrice ne serait-ce que de la taille d’un petit bouton peut déstructurer le processus postural et générer d’intenses douleurs alors qu’une cicatrice de grande taille comme par exemple une cicatrice de césarienne peut être tout à fait saine, sans influence sur le processus postural.
Le terme pathologique ne faisant référence qu’à leur influence néfaste sur le processus postural, il ne s’agit pas d’un terme dermatologique.
Si une cicatrice pathologique est à l’origine de la déstructuration du processus postural alors elle peut à elle seule justifier l’apparition de douleurs.
Les cicatrices pathologiques ont donc un double enjeux
La détection et le traitement d’une ou plusieurs cicatrices pathologiques est donc indispensable au traitement des douleurs chroniques. Leur diagnostic permet de lever les verrous articulaires qui s’exercent sur le rachis et de structurer le processus postural dans la mesure où l’on traite avec la même importance les 3 autres extérocepteurs (œil, dent et schéma corporel).
Les cicatrices demandent donc une attention toute particulière, sans cela les cicatrices seront toujours la source de verrous articulaires, on ne pourra pas expliquer la chronicité des douleurs et on ne pourra pas mener à terme un traitement de Posturoception.